CR Embrun

Mardi 15 août 2006

Embrun, j'y vais juste avant l'UTMB, non pas pour me préparer à l'UTMB, pas non plus pour y faire une performance, mais parce que j'aime ce triathlon. Je prévois de faire à peu près le même temps qu'en 2004 (15h), mais mon entraînement me fais un peu peur. J'ai certes environ 2000 bornes de course à pied dans les pattes, mais à peine 800km de vélo, et environ 10km de natation, sur l'intégralité de l'année 2006. Autant dire, j'y vais en touriste...

Le départ est fidèle à lui-même, la grande inquiétude est de savoir si on a vraiment bien été suffisamment aux toilettes, et il y a ce petit moment de doute juste avant de plonger dans l'eau, où l'on se dit "nom de Zeus, qu'est-ce que je fous ici?".

Cette année il y a beaucoup de concurrents, environ 900 je crois, et ça bouchonne dur. Je n'arrive pas à m'extirper de la mélasse, c'est limite désagréable. Je dois attendre le bout du plan d'eau et le retour pour pouvoir enfin dégager sur la droite et avoir la paix. Ouf. Je fais un petit point sur ma forme: tout va bien. J'ai les bras qui chauffent mais j'ai l'impression de bien avancer, et je ne fatigue pas trop. Apparemment je vais réussir à boucler les 3800m même avec mon entraînement de charlatan. De fait je sors en 1h15, inespéré.

J'enfourche mon vélo le plus vite possible, j'hésite à m'habiller un peu chaudement puis décide qu'il va faire beau et chaud (!) et pars en débardeur, avec un coupe-vent boudinné dans ma poche. Je monte lentement, et plein de coureurs me rattrapent. Mon but est de finir le vélo dans le temps limite, voir de le finir tout court. Les entraînements les plus longs de l'année, je les ai fait il y a une semaine, et c'était seulement 50km... Certes dans ces 50km il y avait l'Izoard, mais tout de même, ma préparation repose sur des trajets Argenteuil - St Quentin en Yvelines (30km), et là je m'attaque à 188km. Bien sûr, j'ai fait un 100 miles à pied donc j'ai "du fond", mais il convient de rester prudent.

Il ne fait pas si chaud que ça. Mais je fais le pari que le soleil va nous réchauffer. On commence à s'extirper de l'ombre. Comme d'habitude, la vue sur le lac de Serre-Ponçon dans la dernière descente avant Savines est superbe. Rien que pour ça ça vaut le coup de prendre le départ. Dans les traverses, j'ai plutôt moins mal aux jambes qu'en 2004, mais je n'en tire pas de conclusion particulière. La remontée du Guil est franchement pénible, car on a le vent de face. Je me dis qu'il ne faut pas se faire d'illusions, et qu'on l'aura de face au retour aussi.

Arrivé à l'Izoard, je décide d'en mettre un coup. J'ai lâchement doublé Thierry avant les lacets qui mènent au départ du col (il s'était arrêté pour pisser) et je reprends "La Pêche" avant Arvieux, de mémoire. Je monte à un bon rythme, j'ai des jambes du souffle, et lorsque je croise Jean-Michel dans les derniers lacets avant l'arrivée, j'ai un super moral, et suis relativement en forme. Certes mes jambes sont un peu attaquées, mais ça va. J'ai fait une cure de banane depuis le début du parcours (j'en suis déjà à la 5ème ou 6ème) et tout se passe bien. Question horaire je suis OK, il est 12h15, tout va bien. Par contre j'enfile mon coupe-vent pour la descente, le soleil s'est caché derrière un voile laiteux de nuages désagréables, il fait froid, quel mois d'août pourri...

Descente tranquille, et traversée de Briançon. Un peu moins lugubre que d'habitude, il y a un peu de public, mais la suite est peu réjouissante. C'est là que ce parcours vélo montre son vrai visage. J'attends avec appréhension la côte de l'Argentière, et le sentiment qui domine chez moi avant de l'aborder, c'est la peur. Puis, lorsqu'elle dévoile son vilain visage (un grand tout droit à flanc de montagne avec des coureurs qui peinent 500m devant) la peur cède la place à la colère. Greu! J'ai l'impression que chaque année c'est pire... Je peste et râle en montant, mes jambes faiblissent, j'en ai plus qu'assez. Bizarrement, je suis convaincu qu'il y a une autre hostilité du même genre derrière, mais en fait non, c'est une côte "civilisée".

Je prends un certain plaisir à descendre les lacets avant l'aérodrome, et je sympathise avec un coureur essonnien qui s'interroge si l'ambiance au Tri91 est bonne ou pas, car dans son club, bof... Je lui explique que j'habite dans le 95 et que si j'y suis resté, à ce club, c'est qu'il doit y avoir une raison 8-)

Je lâche un peu de terrain dans les traverses, sur le retour, suis (chaque année c'est pareil...) démoralisé de voir des coureurs à pied lors du passage du pont en fer, et j'entame la dernière montée. Cette année, Chalvet sera très dure pour moi. Je m'y fait la réflexion que les coureurs à pied ne savent pas ce que c'est qu'une côte. Il faut être monté sur deux roues pour vraiment réaliser à quel point le dénivelé peut être cruel et difficile. J'en chie j'en chie, j'arrive pas à me motiver pour monter vite, et de toutes façons, je suis cuit... L'arrivée au sommet est une vraie délivrance, ouf, plus qu'un marathon et c'est dans la boîte.

Arrivé à Embrun, grand coup au moral, je pose mon vélo alors qu'arrive le 3ème concurrent. Le 3ème, déjà... J'ai 5 à 10 minutes de retard sur mon horaire d'il y a deux ans, il n'y a pas photo, quand on n'est mal entraîné... Ceci étant, je devrais déjà être heureux de m'en tirer à si bon compte.

Départ à pied, et bonnes sensations, je ne vais pas vite - après tout, c'est normal, je n'ai fait aucun travail de vitesse, que de l'allure lente - mais j'ai l'impression que je pourrais maintenir ce rythme pendant des heures. Je compte là-dessus pour rentrer en 4h50 au marathon, et passer sous la barre des 15h00. Pendant tout un tour, j'y crois fort. J'ai un peu le bide en vrac, et emprunte leurs toilettes à des vacanciers, un peu surpris de ma démarche. Ils se demandent si c'est autorisé par le règlement. Je ne sais pas, mais bon, d'un certain point de vue, quand faut y aller, faut y aller, donc c'est ça où je dépose une bouse sur le talus 100m plus loin...

Sur le deuxième tour, la pluie s'invite dans la partie. Je peste et râle, moi qui résiste plutôt bien à la chaleur, cette pluie m'emm*rde. J'ai froid, je sens mon ventre qui commence à vraiment vaciller, et j'en ai vraiment plus qu'assez. Mon rythme de course baisse. A l'inverse de 2004 où j'avais beaucoup marché sur la fin, j'arrive à courir de manière assez constante, mais je me traîne, je suis une vraie tortue. En fait le mode "survie" si efficace sur la fin d'un trail de 100 miles ne vaut pas grand chose sur un marathon d'Ironman où le standard, en terme d'allure, est plus élevé.

Bon, tant pis, je vois mon objectif de 15h00 s'envoler en fumée. En plus, j'ai l'UTMB dans 10 jours, autant ne pas m'atomiser totalement. Je finis donc sans trop m'exploser, "au train", et termine en 15h20. Ce n'est ni mon meilleur temps ni le pire, mais vraiment, sur la fin, il m'était impossible de me donner à fond, tant mes pensées étaient tournées vers l'UTMB et ses 8500m de dénivelé.

Moralité, on ne prend pas Embrun à la légère, et ce n'est pas avec un entraînement de rigolo et en en faisant un objectif intermédiaire qu'on peut y faire une performance. Ceci étant, qui en doutait?

Je reste très content de ma course, j'ai bien profité du superbe parcours vélo, et ça m'a mis pas mal en confiance pour l'UTMB, car sincèrement, on m'aurait dit qu'il y avait un 3ème, voire même un 4ème tour à pied, je ne dis pas que ça m'aurait fait plaisir, mais j'y serais allé.

Et maintenant, repos, en attendant les choses sérieuses .

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Mis à jour le dimanche 03 septembre 2006.